raconter une séquence de vie dans un bain maure
Le bain maure suscite pour moi à la fois l’effroi et la nostalgie. Les souvenirs, j’en garde des images floues. La première visite reste cependant éternelle. C’était un Dimanche estival. Tous les enfants jouaient dehors. Moi, je regardais inlassablement ma mère en train de se préparer pour me ramener à un lieu qui m’était jusqu’alors méconnu, voire mystérieux.
A la grande porte du bain, une vieille et grosse femme m’examina minutieusement pour s’assurer de mon âge. Elle avait la possibilité de lire les ans et les mois dans les fins tissus du visage et qu’un microscope sophistiqué n’arrive pas à détecter. Une fois la permission donnée, une porte merveilleusement glissante s’ouvrit et laissa échapper une vapeur chaude et puante.
Je demeurais un instant perplexe. Mes pas furent courts et hésitants, pendant que ma main se colla inconsciemment à celle de ma mère. Elle me dénuda comme pour effacer une fois pour toute la rougeur de mes petites joues. J’avais encore cinq ans, et je ne sais pas si je dois qualifier ma situation de honte ou d’une conséquence normale de la chaleur infernale dominant le lieu.
Le bain se composait de trois grandes salles soigneusement séparées l’une de l’autre afin de garder la température. Les enfants préféraient la plus proche du cabinet de caissière. Elle était moins chaude et par conséquent moins fréquentée par les femmes. On y nouait des relations ambiguës. Le lieu m’était toujours inconnu.
Je me baladais d’un coin à un autre, en quête de réponses à des questions qui me dérangeaient. Mes mains tremblaient. La lumière terne et l’air écœurant m’asphyxiaient. Une grande douleur abattait mes entrailles. J’avais besoin de vomir. Mes yeux s’alourdirent. Je ne les avais ouverts que chez moi à la maison.
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